Ce que j’ai vu à Moscou
Après la révolte irlandaise et la révolution fasciste italienne, Henri Béraud part en septembre 1925, pour le compte du Journal, en URSS. Dans une langue toujours parfaite, notre flâneur salarié conte 1001 scènes de la vie moscovite auxquelles il assiste, des nepmen si peu socialistes aux gens du peuple qui se baignent nus dans la Moskova, des orchestres tsiganes qui, dans les restaurants, font « tomber des larmes de leurs violons » aux personnels des hôtels espionnant les étrangers pour le compte du Guépéou.
S’il va voir la momie de Lénine, Béraud s’entretient avec le puissant Kamenev, pas encore purgé, essaie de rencontrer Trotsky, déjà écarté et invisible. Plus drôle, il assiste à un ahurissant soviet surréaliste réunissant à la fois des peintres et des cochers !
Tout le talent de Béraud est là, dans ces « choses vues » avec un œil amusé mais acerbe, qui démonte le mirage Potemkine du communisme naissant. D’ailleurs, les communistes ne lui pardonneront pas ce livre à la Libération quand, s’ajoutant à l’épisode Salengro, cela lui vaut une peine d’une incroyable dureté au regard de son attitude sous l’Occupation.
Journaliste et grand reporter, romancier, polémiste, l’écrivain lyonnais Henri Béraud (1885-1958) fut un des journalistes les plus célèbres et lus de son temps, prix Goncourt pour son Martyre de l’obèse. Auda Isarn réédite successivement ses trois reportages (Ce que j’ai vu) à Rome, Moscou et Berlin.
19,00 €
La presse en parle
Les éditions Auda Isarn nous offrent, avec la réédition de ce livre, qui acte sa rupture avec le communisme, la possibilité de redécouvrir le grand journaliste et écrivain qu’est Henri Béraud.
(Robert Spieler, Rivarol)
En 1925, le grand reporter Henri Béraud est envoyé par son journal, qui s’appelait précisément Le Journal, en URSS. Il s’agit de raconter en toute objectivité ce qu’un journaliste peut voir et comprendre du nouveau régime des Soviets. Béraud fait partie des privilégiés ayant pu obtenir l’autorisation de voyager dans le pays. Il est réputé être plutôt de gauche, venu de l’extrême gauche, et il n’est pas vraiment hostile, alors, à cette révolution bolchevique qu’il imagine flamboyante et romantique. (…) Mais la réalité va le rattraper, et c’est un Béraud désabusé et devenu anticommuniste qui quitte le pays. Il se définit alors comme un « pèlerin déçu ». La gauche française, encore tout entière dupe de la monstruosité bolchevique, et qui pensait que Béraud, l’ami de Vaillant-Couturier, était l’un des siens, ne lui pardonnera jamais ce revirement, qui éloigna définitivement du PCF une partie de ce que l’on appelait la « classe ouvrière », celle qui suivit par exemple Doriot dans sa scission et dans d’autres aventures… plus ou moins heureuses. Ce que j’ai vu à Moscou correspond à un moment de l’histoire des intellectuels français, mais ce livre appartient d’abord à la littérature, car Béraud fut un très grand écrivain.
(Francis Bergeron, Présent)
Un reportage magistral qui appartient à une trilogie sur les totalitarismes. (…) Dans cette somme écrite sur le vif, où le tragique rejoint le cocasse, on est presque étonné d’entendre, un siècle plus tard, l’écho de nos villes et de nos vies. Aujourd’hui, c’est un Ce que j’ai vu à Paris (ou à Saint-Denis) qu’il faudrait écrire.
(Bruno Lafourcade, Eléments)
Le « retour d’URSS » a été un genre littéraire. Il permettait les contes de fées aussi bien que les « calomnies contre la patrie des travailleurs », notamment celles de Gide et aussi de Dabit qui mourut mystérieusement sur place en 1936. Henri Béraud s’y rend en 1925 avec un a priori favorable, quoique sentimental : son père était un travailleur manuel (boulanger). Béraud cherche le communisme idéal et ne le trouve pas dans la NEP encouragée par le régime jusqu’en 1927. Il voit naître ce qui deviendra la matrice du voyage organisé des agences : usines-modèles, fermes-écoles, bref la « caserne-paradis ».
(Alain Paucard, Service littéraire)
Poids | 265 g |
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